Brouette... ... ... Ce simple mot est plein de mystère. Je vais tenter de lever les énigmes que je vais tout d’abord vous soumettre.
Il est bien connu que tout les mots finissant en « –ette » sont des diminutifs du radical qui précède. Des dizaines d'exemples vous sautent déjà à l'esprit tels que : fourchette, jupette, serpette, trompette, barquette, casquette, disquette, lance-roquettes, languette, nymphette, piécette, caissette, chaussette, barbichette, tapette, pochette, vachette, fléchette, crevette, gouttelette, banquette, margoulette, etc.
Le mot brouette devrait-il échapper à la règle ? Sinon, qu'est-ce qu'une «
Broue » ?
Après des semaines d'intense recherche, je peux enfin vous dévoiler la vérité.
La brouette est bien une petite « broue ». Il faut chercher l'origine de l'autre côté de la manche.
Au
XVIIIème siècle, les Anglais jouissaient déjà d’une réputation de jardinier hors-pair. Il était ancré dans l'imaginaire des autres peuples d'Europe un
jardinier anglais coupant son gazon à la serpette.
Or les légendes reposent toujours sur un fond de vérité et les jardiniers royaux de Londres coupaient bien l'herbe à la serpe… …sur le green du
terrain de golf royal.
Cette tonte qui nécessité de nombreuses heures de travail répétées toutes les semaines était la plaie des jardiniers du roi
Georges III . L'un d'entre eux, plus astucieux, eu une idée qu’il suggéra au roi.
Les hommes qui coupaient l’herbe du green de Georges III la déposaient dans de petits paniers qu'ils étaient obligés d’aller vider à chaque fois que celui-ci était plein. De cette manière, ils perdaient un temps fou à faire des allers et retours entre le green et le tas d'herbe. L'idée était de pouvoir emmener plus d'herbe d'un coup. Pour ce faire, le jardinier conçu un panier beaucoup plus grand que les autres où tous pourraient déposer l'herbe coupée qu'ils appelaient
« brought grass », littéralement l' « herbe ramassée ». Le jardiner concepteur du panier se rendit vite compte que celui-ci était trop grand pour être manié facilement.
Il y ajouta une roue très large pour ne pas abîmer la pelouse du green (les pneus n'existaient pas) et des poignets pour facilité le transport.
Après quelques semaines d'utilisation qui améliora considérablement le travail des jardiniers du golf royal, ces gazonniers avaient pris l'habitude de nommer le chargement du nouvel outil
« the brought » par analogie avec l'herbe ramassée dans les anciens petits paniers.
Le contenu donna rapidement son nom au contenant qui n'en avait pas.
Par la suite, le jardinier inventeur de la « brought » s'exila en France, car au début de la
guerre de sept ans qui faisait rage en Europe à cette période, il avait donnait des renseignements à la France sur les activités de son roi.
Il fut reçu à la cour du roi de France,
Louis XV le Bien-Aimé , qui voulu bien l'ajouter à son équipe de jardiniers royaux.
Il apporta donc son invention en France où celle-ci reçut le même franc succès qu'elle avait connu outre-Manche.
Les jardiniers de la Cour ne savaient comment nommer cet étrange outil mais le jardinier anglais appelait cela « a brought » et après simplification de la prononciation, le mot se dit
« Broue » en français.
Nous tenons enfin notre broue. Mais alors pourquoi être passé à son diminutif « brouette » ?
Le golf de Louis XV était beaucoup plus petit que celui de Georges III, et la broue était un peu démesurée par rapport à la taille du green français. Notre jardinier rétrécit donc la taille de sa broue et toute la cour nomma cette nouvelle invention
« brouette » de fait de sa petite taille par rapport à la broue d'origine.
Le mot n'a pas tenu en Angleterre car on voulut oublier toutes les inventions du traître. Les jardiniers royaux de Londres furent même obligés de reprendre leurs paniers.
La brouette se diffusa rapidement en France et ses fonctions se diversifièrent pour finalement ne servir qu’au transport des choses encombrantes du jardin alors qu'à l’origine elle permettait d’accélérer un travail soigneux.
Son inventeur doit se retourner dans sa tombe.
Lorsque l'invention repassa la frontière de la Manche, les anglais nommèrent
« barrow » cet ustensile de transport. Il a été récemment remarqué une anecdote amusante : en anglais, la brouette à deux noms « barrow » et « wheelbarrow » où
« wheel » désigne la roulette. Les anglais ont-ils vraiment oublié les origines de la brouette qui n’avait pas ladite roulette lors de sa première utilisation ?
Voilà, j'espère vous avoir convaincu de l'étymologie du mot « brouette ». Vous pourrez frimer en expliquant —en détail— à vos proches l'origine de ce mot si mystérieux.
Faites tout de même attention de ne pas tomber sur quelqu'un de plus renseigné que vous car vous pourriez vous faire ridiculiser.
En effet, mis à part les rois de France et d'Angleterre qui furent bien Georges III (qui régna de 1760-1820) et Louis XV (1715-1774) et qui participèrent bien à la guerre de sept ans, tout le reste n'est qu'
un tissu de mensonge : la brouette n'est pas une petite broue, mot qui n'exista jamais pour désigner ne serait-ce qu'un objet ressemblant à la brouette (
Brou : n.m. Enveloppe verte des fruits à écale, tels que les noix ;
Broue : n.f. Mousse d'une bière.
Péter de la broue : expression québécoise signifiant « se prendre pour quelqu'un d'autre » ).
Le mot
« brouette » tient ses origines directement du latin « birota » qui désignait un « véhicule à deux roues ». La première acceptation du mot « brouette » avec cette orthographe date du XIIIème soit bien avant la petite fiction que je viens de vous conter.
J'espère au moins que cela vous aura amusé.
Il est aussi à remarquer que le suffixe « -ette » n'a pas pour règle universelle de donner le diminutif du radical qui le précède, comme le prouve le mot étudié dans cette rubrique.
Ainsi une
crevette n'est pas une petite crevée, mais est formée sur une forme de l'Ouest de « chevrette », nom du crustacé ; un
lance-roquettes n'est pas un petit « lance-roc » bien qu'en remontant à l'origine, le mot roquette à bien subit une « diminution » : Roquette vient de l'anglais « rocket » du vieux mot français « roquette » qui signifiait déjà « fusée de guerre ». Ce même mot est un emprunt de l’italien « rochetta » soit « fusée », diminutif de « rocca » du germanique « rukka » désignant une « quenouille » en raison de l'analogie de forme... pfiou !
D'autre part, une
banquette n'est pas une petite banque, mais un petit banc. Le diminutif est conservé, la règle s'applique, même si le suffixe change le genre du mot.
De même la
barquette est une petite barque. Cela saute moins au yeux, mais pensez aux gâteaux en forme de bateau. Et voilà le rapport ! On ne sait trop comment ce mot à changer de sens pour désigner un « petit panier » au XXème siècle.
Il est aussi à remarquer que la petite barbiche et la petite tape sont les mots bien connus d’une célèbre comptine durant laquelle on ne doit pas rire...
Et finalement, la
margoulette... bien qu'il ne s'agisse pas d'une petite margoule, mot qui n'existe pas, a bien subit un affaiblissement ; ce mot est en effet un diminutif de « goule », forme ancienne de « gueule ». Le premier élément du mot, soit « mar- », étant sans doute un emprunt au verbe « margouiller » qui signifiait « mâchonner ».
Références :
Dictionnaire étymologique et historique de la langue française, E.Baumgartner et P.Ménard, Quatrième édition 2003 : Le livre de poche, Encyclopédies d'aujourd'hui.
Dictionnaire des Rimes, L.Warnant, Réédition 2001(première ed.1992) : Larousse,Références.
Dictionnaire Anglais-Français - Français-Anglais, G.Cronin (Directeur de projet), I.Elkaim et L.Larroche (Rédactrices), Seconde édition 2002 (première ed.1997) : Harrap's Compact.
Le Petit Larousse Illustré, Y.Garnier (Directeur éditorial), Réédition 1998 : Larousse.
Dictionnaire Des Structures Du Vocabulaire Savant, H.Cottez, Deuxième édition 1980 : Les Usuels du Robert.
J’adore cette rubrique